Chronologie de l'invention
Les essais et réalisations de Nicéphore Niépce sont connus grâce à sa correspondance et à quelques notes manuscrites rédigées par l’inventeur comme la Notice sur l’Héliographie. Cependant, ces sources sont lacunaires et les documents conservés donnent souvent peu de détails sur les techniques employées (craignant de se faire voler sa découverte, Niépce restait volontairement imprécis lorsqu’il l’évoquait). Il est donc impossible de reconstituer avec exactitude l’ensemble des réalisations qui le conduisirent à mettre au point l’héliographie.
Niépce débuta ses expériences sur la lumière en mars 1816 à l’âge de 51 ans. Il les poursuivit sans relâche pendant 17 ans jusqu’à son décès soudain le 5 juillet 1833. Ses recherches comportaient trois axes : les substances photosensibles ; les supports accueillant ces substances et sur lesquels se formait l'image ; enfin, les instruments optiques permettant d'obtenir des images (chambres noires). Ses avancées dans ces trois domaines furent tantôt successives, tantôt simultanées.
Substances photosensibles
Niépce expérimenta de nombreux produits photosensibles afin d’en trouver un qui réponde parfaitement à ses attentes et lui permette d’obtenir des images permanentes positives. Ses choix dans ce domaine furent le résultat de ses lectures (influence du Dictionnaire de Chimie de Klaproth ou encore des ouvrages de physique de l’abbé Nollet) autant que de son expérience personnelle (Niépce réutilisa, pour l’héliographie, des substances qu’il avait étudiées pour le Pyréolophore comme l’huile de pétrole blanche ou le bitume de Judée).
Le but recherché par Niépce était qu'une image se forme (photosensibilité), qu'elle soit permanente et positive.
Supports
Les nombreux produits photosensibles expérimentés par Niépce le furent sur différents supports : papier, pierre, cuivre, étain, plaqué d’argent, verre. Ces supports furent choisis par l’inventeur en fonction de leur usage courant (papier du dessinateur, pierre du lithographe, cuivre du graveur) ou de leurs qualités intrinsèques (transparence du verre, clarté et éclat de l’étain et de l’argent).
Son objectif était que l’image qui se forme sur le support soit la plus lisible et la plus fidèle possible et éventuellement que le support puisse être gravé pour servir de matrice et permettre la réalisation de tirages multiples.
Les chambres noires
Les chambres noires utilisées par Niépce furent dans un premier temps réalisées par ses soins ou par des artisans locaux (1816-1824). Puis, Niépce ayant mis au point un procédé satisfaisant, il commanda des chambres et des instruments optiques à l’opticien parisien Vincent Chevalier (1825-1829). Enfin, il s’associa avec le peintre Daguerre afin que ce dernier, grand spécialiste d’optique, lui construise une « chambre obscure perfectionnée » (1829-1833).
Niépce cherchait à obtenir, en un temps de pose très court, des images nettes, claires et détaillées.
Chronologie
1797
Nicéphore et son frère aîné Claude ont l’idée de fixer les images qui se forment dans la chambre noire. Le cadet s’attellera seul à cette tâche 19 ans plus tard.
1816
Nicéphore, alors âgé de 51 ans, réalise ses premières expériences sur la lumière. Il utilise le papier puis la pierre comme support. Il fabrique également trois chambres noires afin de réaliser des « points de vue ».
Au printemps 1816, Niépce commence par expérimenter l’effet de la lumière sur du papier recouvert d’une substance photosensible. Le choix de ce premier support s’explique par l’idée de départ de l’inventeur : fixer, à l’aide de la lumière, les images qui se forment dans la chambre noire du dessinateur (et que ce dernier relève sur papier). Le papier s’impose donc comme support par excellence du dessin que Niépce voudrait faire réaliser par le Soleil.
Devant l’impossibilité de fixer les images qu’il obtient sur papier, Nicéphore abandonne très vite ce support pour se tourner vers la pierre sur laquelle il espère réussir à graver chimiquement l’image qu’il obtient afin de la rendre permanente mais aussi de pouvoir la dupliquer (la pierre devenant ainsi une matrice d’impression). Le choix de ce second support, au printemps 1816, est lié à la recherche par Nicéphore, à la même époque, de pierres calcaires adaptées à la lithographie, nouvelle technique de gravure mise au point en Allemagne en 1796 et introduite à Paris en 1802. Niépce explore donc cette voie mais il est arrêté par la difficulté de graver les demi-teintes des images qu’il obtient.
1818
Niépce fait appel au chimiste parisien Nicolas-Louis Vauquelin, membre de l’Académie des Sciences, afin de se procurer certaines substances photosensibles.
1822
Premières expériences sur verre. Niépce effectuera à plusieurs reprises des essais sur ce support dont il appréciait la transparence.
Niépce expérimenta le verre entre 1822 et 1825 mais également en 1828-1829 après avoir découvert avec émerveillement à Paris les spectaculaires effets du Diorama de Daguerre. Au cours de l’été 1822, il obtient sur ce support une copie de gravure représentant le pape Pie VII. Offerte à l’un de ses parents, le général Poncet du Maupas, cette image sera finalement détruite par accident.
1823
Première mention de copies de gravures.
1824
Au mois de septembre, Niépce obtient un résultat décisif : un point de vue parfaitement réussi. Son invention est alors en bonne voie. Conscient de sa réussite, il n’hésite plus à confier son secret à ses proches (son cousin Alexandre du Bard de Curley, par exemple) ou à entrer en contact avec des personnes pouvant l’aider (le graveur Lemaître, l’opticien Chevalier).
En 1824-1825, Niépce (qui utilise désormais une substance chimique lui offrant des résultats très satisfaisants, le bitume de Judée) délaisse le support pierre pour utiliser du cuivre, le caractère réfléchissant du métal lui semblant propice à l’obtention d’images nettes et clairement définies (cf. Le cheval et son conducteur). Satisfait de son procédé, l’inventeur entre alors en contact avec le graveur parisien Lemaître afin d’obtenir ses conseils en matière de gravure sur cuivre. À partir de cette époque, il passe également régulièrement commande d’instruments d’optique à l’opticien Vincent Chevalier.
1826
Nicéphore donne un nom à son invention : ce sera l’héliographie.
En 1826, à force d’essais et de réflexion, Niépce remplace le cuivre par l’étain. Ce matériau, plus « blanc » que le cuivre, lui semble idéal pour obtenir de meilleurs résultats. C’est sur des plaques d’étain qu’il réalise ses héliographies les plus connues, à la fois copies de gravures (cf. Le Cardinal d’Amboise, La Sainte Famille, etc.) et points de vue (cf. Le Point de vue du Gras).
1827
S’étant rendu en Angleterre, au chevet de son frère malade, Nicéphore tente de vendre son invention outre-manche. Pour cela, il rédige un descriptif de son procédé connu sous le nom de Notice sur l’héliographie.
Lors de son séjour en Angleterre, de septembre 1827 à février 1828, Nicéphore tente de vendre son invention. Pour cela, il entre en contact avec différentes personnalités du monde des Sciences et des Arts. Il se lie alors d’amitié avec le botaniste Francis Bauer, membre de la Société Royale de Londres. Niépce offrira certaines de ses héliographies à Bauer dont le fameux Point de vue du Gras, redécouvert en 1952 à Londres. Transitant par Paris à l’aller et au retour, Niépce y rencontre ses correspondants parisiens parmi lesquels se trouve le peintre Daguerre qui s’intéresse de près aux travaux du chalonnais.
1828
Au printemps 1828, de retour en Bourgogne, Nicéphore change de support, remplaçant l’étain par du plaqué d’argent (cuivre recouvert d’une fine couche d’argent). Il suit en cela les conseils du graveur Lemaître. La blancheur et l’éclat de l’argent lui permettent d’obtenir de très bons résultats et, en 1828-1829, Niépce multiplie les essais à l’aide de ce support. Au cours de l’été 1829, Niépce perfectionne encore son procédé : il utilise désormais les propriétés de l’iode pour rendre positives les images qu’il obtient (seul difficulté qu’il lui restait à vaincre).
1829
Association avec Louis Jacques Mandé Daguerre. Les travaux prennent alors une nouvelle tournure, le peintre fixant comme priorité absolue l’abaissement du temps de pose.
En décembre 1829, Niépce signe un contrat d’association avec le peintre Daguerre afin d’améliorer son invention et de pouvoir la commercialiser. Les progrès sont alors à accomplir dans deux voies : l’amélioration de l’optique de la chambre noire et la réduction du temps de pose. Le rôle de Daguerre consiste à perfectionner l’invention en apportant ses connaissances en matière d’optique.
1832
Mise au point du physautotype, procédé dont on ne conserve aucun exemple mais qui semble avoir donné de très bons résultats grâce à des temps de pose relativement courts.
En juin 1832, les deux associés mettent au point le physautotype, un nouveau procédé beaucoup plus rapide que celui utilisé jusqu’alors par Niépce. Si la substance photosensible n’est plus du bitume de Judée mais du résidu d’essence de lavande, le support reste en revanche du plaqué d’argent. Dans les mois qui suivent, Niépce et Daguerre concentrent leurs efforts sur le physautotype, multipliant les essais à l’aide de ce procédé.
1833
Le décès de Niépce interrompt ses recherches sans qu’il ait pu faire connaître son invention.
1839
Date officielle d’invention de la photographie avec la divulgation du daguerréotype, procédé mis au point par Daguerre à partir de ses travaux avec Niépce.