Biographie de Nicéphore Niépce


1765

Naissance, le 7 mars, à Chalon-sur-Saône, de Joseph Nicéphore Niépce, troisième enfant d’Anne-Claude Barrault et de Claude Niépce, avocat à la cour du Roi et receveur des consignations du chalonnais. Famille aisée, les Niépce possèdent de nombreuses propriétés à Chalon-sur-Saône comme dans ses environs (Saint-Loup-de-Varennes, Jambles, Colombey, etc.).

1780 - 1794

Après avoir reçu une solide éducation dans des institutions religieuses de Chalon-sur-Saône puis d’Angers, Nicéphore entame une carrière militaire. Ayant participé à la protection de Chalon-sur-Saône durant les troubles de la Révolution, il est fait sous-lieutenant des armées révolutionnaires en 1792. L’année suivante, il s’installe à Nice où son régiment est en garnison. Il participe à plusieurs actions militaires avant de tomber malade. Après plusieurs mois d’hospitalisation, il quitte l’hôpital, mais le verdict du chirurgien en chef est sans appel : « Joseph Niepce (…) a la vue naturellement si basse qu’il ne peut distinguer et même apercevoir qu’avec beaucoup de peine, les objets les moins éloignés (…) cette infirmité le rend inhabile à exercer les fonctions de son état». Fin 1794, Nicéphore quitte donc définitivement l’armée à l’âge de 29 ans.

1794 - 1795

Le 4 août 1794, à Nice, Nicéphore épouse Agnès Romero, une jeune veuve de 34 ans mère de deux enfants. Huit mois plus tard naîtra Isidore Niépce, premier enfant du couple.

1797 - 1801

Après un long voyage en Sardaigne avec son épouse et son frère aîné Claude, Nicéphore séjourne quelques temps à Milan avec ce dernier. Au cours de ces deux voyages, les deux frères jetteront les bases des deux entreprises de leur vie : le Pyréolophore et l’héliographie. Au printemps 1801, Nicéphore, Agnès, Isidore et Claude quittent définitivement Nice pour Chalon-sur-Saône.

1803 - 1807

Nicéphore et Claude s’investissent entièrement dans leurs travaux scientifiques et cherchent à mettre au point un moteur «dont le principe est l’air dilaté par le feu» auquel ils donnent le nom de Pyréolophore. Le 20 juillet 1807, un brevet d’invention est délivré aux frères Niépce qui obtiennent ainsi la protection de leur machine pour une durée de dix ans. Ils consacreront ces dix années (1807-1817) à améliorer leur moteur.

1807 - 1809

Nicéphore et Claude imaginent un projet de « pompe hydrostatique » afin de répondre à la volonté de Napoléon de renouveler l’installation hydraulique du château de Marly. Mais leur proposition arrive trop tard, l’Empereur ayant déjà désigné un ingénieur pour remplacer l’ancien système d’alimentation en eau. Parallèlement à ces nouvelles recherches, les travaux destinés au perfectionnement du Pyréolophore se poursuivent.

1811 - 1813

Ayant eu vent de la volonté du ministère de l’Intérieur de voir se développer en France la culture du pastel – afin de remplacer l’indigo pour la teinture des textiles – Nicéphore et Claude se lancent dans la culture de cette plante espérant remporter la récompense offerte par l’État et pouvoir ainsi continuer à financer leurs travaux sur le Pyréolophore. Ils envoient donc à Paris des échantillons de fécule colorante (extraite des feuilles de la plante) et y joignent un rapport détaillant la manière dont ils ont obtenu cette substance. Mais leurs récoltes, bien que de bonne qualité, sont peu abondantes et les deux frères finiront par abandonner ce projet en 1813. Dans le même esprit, Nicéphore et Claude s’essayent également, durant cette période, à la fabrication du sucre de betterave.

1814 - 1815

Début des difficultés financières des Niépce. Les travaux sur le Pyréolophore se prolongent et les matériaux coûtent chers. Nicéphore et Claude multiplient les emprunts notamment auprès d’Alexandre du Bard de Curley, un de leurs cousins issus de germain. En outre, les troubles occasionnés par la chute de l’Empire et la restauration de la monarchie ne favorisent pas l’avancée des travaux des deux inventeurs.

1816

Avec l’approche de l’échéance du brevet du Pyréolophore, Claude part s’installer à Paris afin d’y trouver des contacts pour exploiter au mieux cette invention et lui trouver des débouchés pratiques. Nicéphore, resté seul en Bourgogne, décide de se consacrer à des recherches sur la lumière. Il se fixe comme objectif de réussir à fixer de manière permanente et sans le recours à la main de l’homme les images qui se forment dans la chambre noire, appareil d’optique utilisé depuis plusieurs siècles par les dessinateurs. Rapidement, il obtient des images mais celles-ci présentent à ses yeux deux «défauts» : elles sont négatives (valeurs inverses à celles du sujet) et non fixées (elles finissent par s’effacer). Persuadé de l’intérêt et du potentiel de cette découverte, Nicéphore poursuivra jusqu’à sa mort ses expériences sur la lumière.

1817

À Paris, Claude multiplie les démarches pour promouvoir le Pyréolophore. Un projet d’association avec l’industriel Jouffroy d’Abbans – qui possède un chantier naval à Chalon-sur-Saône – est finalement abandonné. Le brevet du moteur étant arrivé à expiration et le gouvernement ayant rejeté son prolongement, Claude décide de partir s’installer en Angleterre pour y améliorer et y vendre l’invention. De son côté, Nicéphore poursuit ses propres travaux sur la lumière tout en se démenant pour aider financièrement son frère.

1818 - 1827

Durant près de dix ans, les deux frères poursuivront, chacun de leur côté, leurs travaux respectifs. Si, à la demande de son frère, Nicéphore effectue parfois des essais relatifs au Pyréolophore, il consacre le plus clair de son temps à ses recherches sur la lumière, expérimentant de nombreux produits photosensibles appliqués sur divers types de supports (papier, pierre, verre, métal, etc.). Ses recherches sont menées dans deux directions : les « copies de gravures » (par contact direct entre une gravure rendue translucide et une surface sensible à la lumière) et la réalisation de « points de vue » (à l’aide d’une surface sensible placée dans une chambre noire). En outre, Nicéphore réussit à obtenir de multiples épreuves d’une même image (en gravant chimiquement le support métallique sur lequel il obtient celle-ci afin de le transformer en une matrice d’impression). En septembre 1824, le but semble atteint, et même si de nombreuses améliorations restent encore à apporter à l’invention, Nicéphore écrit à son frère : «je suis parvenu à obtenir un point de vue tel que je pouvais le désirer (…) l’image des objets s’y trouve représentée avec une netteté, une fidélité étonnantes, jusqu’à ses moindres détails, et avec leurs nuances les plus délicates». Début 1825, satisfait de ses progrès, Nicéphore entre en contact avec plusieurs personnalités parisiennes susceptibles de l’aider (l’opticien Vincent Chevalier pour tout ce qui concerne la chambre noire et le graveur Lemaître pour sa connaissance de l’art de la gravure). En mai 1826, les progrès de Nicéphore se poursuivent et celui-ci matérialise cette réussite en baptisant son invention : ce sera l’héliographie.

1827 - 1828

Au cours de l’année 1827, Claude, toujours installé en Angleterre, tombe gravement malade. Nicéphore, accompagné de son épouse, quitte alors Chalon-sur-Saône pour se rendre au chevet de son aîné. Là, il apprend que ce dernier est en réalité souffrant depuis plusieurs années et découvre que les prétendus travaux menés depuis 1817 n’existent pas et sont le fruit de l’imagination délirante de son frère. Le choc est grand pour Nicéphore qui doit cependant réagir afin de sortir sa famille des difficultés financières dans lesquelles Claude les a entraîné. Les projets chimériques de ce dernier sont définitivement abandonnés et l’héliographie apparaît comme le seul moyen de sauver la famille de la ruine. Durant les quatre mois que dure son séjour en Angleterre, Nicéphore essaye donc d’attirer l’attention de la communauté scientifique anglaise et des Sociétés savantes londoniennes sur son invention. Pour ce faire, il rédige une Notice sur l’héliographie, dans laquelle il présente le principe et les applications de son extraordinaire découverte. Si cette dernière lui procure l’estime et l’admiration d’un certain nombre de scientifiques et d’artistes, elle ne lui est cependant pas achetée par le gouvernement, comme il l’avait espéré. Début février 1828, le couple Niépce décide donc de rentrer en Bourgogne, Nicéphore souhaitant améliorer son procédé au plus vite afin de pouvoir le vendre et ainsi rembourser ses nombreuses dettes. Quelques jours plus tard, en Angleterre, usé par la maladie et la démence, Claude Niépce s’éteint à l’âge de 65 ans. De retour à Chalon-sur-Saône, Nicéphore reprend ses travaux bien décidé à tirer profit de sa découverte au plus vite.

1829 - 1833

1829 est une année charnière dans la chronologie des travaux de Nicéphore Niépce. Après avoir travaillé seul durant plus de dix ans à la mise au point de l’héliographie, il partage son secret en s’associant avec Louis Jacques Mandé Daguerre, peintre parisien et grand spécialiste de l’optique. Le 14 décembre 1829, les deux hommes signent à Chalon-sur-Saône un traité provisoire d’association, conclu pour dix ans, et par lequel Daguerre se voit chargé de perfectionner la découverte de Nicéphore. Tandis que le chalonnais rédige une nouvelle version de sa Notice sur l’héliographie, le parisien apporte quant à lui ses compétences en matière d’optique afin de construire une chambre noire perfectionnée, adaptée aux besoins de l’héliographie. Dans les années qui suivent, les deux associés travaillent à distance, se tenant respectivement informés de leurs essais par de longues lettres dont ils protègent le contenu à l’aide d’un code secret. Bien que censé améliorer l’optique de la chambre noire, Daguerre se passionne pour l’héliographie et concentre plutôt ses efforts sur la chimie du procédé. S’il est conscient que l’invention de Niépce est révolutionnaire, il considère également qu’elle restera commercialement inexploitable tant que « l’effet » (la formation de l’image sur la surface sensible) ne pourra être obtenu en un temps très court. En juin 1832, alors que Daguerre effectue son troisième séjour chez Nicéphore, les deux hommes mettent au point un nouveau procédé, différent de celui inventé par le chalonnais, auquel ils donnent le nom de Physautotype. Très enthousiastes, Daguerre et Niépce réalisent de nombreux essais et le peintre revient passer quelques jours en Bourgogne au mois de novembre 1832. Mais malgré d’intéressantes avancées, le procédé reste imparfait et la «promptitude» (la rapidité de l’effet) reste à améliorer. Les deux associés poursuivent donc leurs travaux et leurs échanges épistolaires mais le 5 juillet 1833, Nicéphore Niépce décède brutalement à l’âge de 68 ans sans avoir pu faire connaître au monde son extraordinaire invention.

après 1833

Bien qu’il ait été l’inventeur de la photographie et qu’il en ait envisagé les principales applications, Nicéphore Niépce mourut avant d’avoir pu faire connaître son extraordinaire découverte à ses contemporains. Ce n’est finalement que six ans plus tard, en 1839, que la photographie vit officiellement le jour sous la forme du daguerréotype, un procédé sur métal mis au point par Daguerre après la mort de Niépce.