Essais et réalisations de Nicéphore Niépce, chronologie
1816
Constat : obtention d'images mais leurs valeurs sont inversées et elles disparaissent rapidement.
Objectif : inverser les valeurs et fixer définitivement les effets obtenus.
Utilisation d’un support papier : réalisation de points de vue (papier blanc enduit de chlorure d'argent placé dans la chambre noire). Obtention d'effets différentiels éphémères (négatifs non fixés). Son incapacité à fixer les images obtenues le poussera à renoncer au support papier.
Utilisation d’un support pierre : cherchant à obtenir une image qui ne s'efface pas, Nicéphore tente sans succès de graver chimiquement une pierre calcaire.
Utilisation du support cuivre : il tente alors de graver chimiquement des images sur métal mais n'obtient aucun résultat. Comme la pierre, ce support présente pourtant un grand avantage : la possibilité de multiplier les épreuves.
Dispositif optique : conception d'un premier "œil artificiel" puis de deux autres chambres noires : l'une très petite et la seconde de taille moyenne.
1817
Constat : propriétés du phosphore (attaque la pierre).
Objectif : fixer les effets obtenus (via la gravure sur pierre).
Utilisation d’un support pierre : reprise des recherches (interrompues depuis plusieurs mois). Nicéphore cherche toujours à graver chimiquement les images qu'il obtient sur pierre. Il étudie les propriétés du phosphore mais finit par abandonner cette substance après quelques mois.
Dispositif optique : fait réaliser un "appareil" pour ses expériences en cours.
1818
Constat : obtention d'images fixées grâce à l'utilisation du bitume de Judée.
Objectif : inverser les valeurs des images obtenues.
Utilisation d’un support inconnu : Nicéphore obtient des images négatives fixées. Celles-ci sont semble-t-il réalisées à l'aide de bitume de Judée, une substance bien connue de Niépce qui l'avait déjà utilisée comme combustible pour le Pyréolophore (le moteur breveté en 1807).
1819
Constat : obtention d'images fixées grâce à l'utilisation du bitume de Judée.
Objectif : inverser les valeurs des images obtenues.
Utilisation d’un support inconnu : Niépce multiplie les expériences sans que l'on en connaisse le détail. Il semblerait qu'il s'intéresse déjà à la copie de gravures bien que ces essais n'apparaissent dans sa correspondance qu'à partir de 1823.
1820
Constat : obtention d'images fixées grâce à l'utilisation du bitume de Judée.
Objectif : inverser les valeurs des images obtenues.
Utilisation d’un support inconnu : Nicéphore obtient semble-t-il toujours des images réalisées à l'aide de bitume de Judée. À en croire les dires de son frère, ses progrès sont importants.
1821
Constat : obtention d'images fixées grâce à l'utilisation du bitume de Judée.
Objectif : inverser les valeurs des images obtenues.
Utilisation d’un support inconnu : poursuite des expérimentations à l'aide du bitume de Judée (sans doute sur divers supports).
1822
Constat : obtention d'images fixées grâce à l'utilisation du bitume de Judée.
Objectif : inverser les valeurs des images obtenues.
Utilisation d’un support verre : Nicéphore réalise des copies de gravures sur des plaques de verre enduites de bitume de Judée. Certaines sont suffisamment réussies pour pouvoir être offertes à ses proches (cf. Portrait du pape Pie VII).
1823
Constat : obtention d'images fixées grâce à l'utilisation du bitume de Judée.
Objectif : inverser les valeurs des images obtenues et multiplier les épreuves.
Utilisation d’un support pierre : Niépce effectue de nouveaux essais sur pierre en chambre noire et réalise également des copies de gravures. Il tente de graver l'image obtenue à l'aide d'un acide afin de pouvoir se servir de la pierre comme d'une matrice d'impression et ainsi inverser les valeurs et multiplier les épreuves.
1824
Constat : découverte d'un moyen d'inverser les valeurs des images.
Objectif : améliorer la gravure à l'acide des points de vue.
Utilisation d’un support inconnu : Niépce constate qu'une sous-exposition de la substance sensible permet d'obtenir une image à la fois positive et négative. À partir de cette date, la question de l'inversion des valeurs est donc résolue.
Utilisation d’un support pierre : poursuite des essais en chambre noire avec un certain succès. Cependant, l'étape de gravure reste un obstacle (l’acide utilisé ne rend pas les demi-teintes) et il s’avère presque impossible de graver les images réalisées à la chambre noire.
Utilisation d’un support verre : Niépce expérimente son procédé sur verre. Réalisation de points de vue à l'aide d'une petite chambre noire.
Utilisation d’un support cuivre : A l'aide de son procédé (le bitume de Judée), Nicéphore réussit à graver sur cuivre des images obtenues dans la chambre noire.
1825
Constat : améliorer la gravure à l'acide des points de vue.
Objectif : obtention d'épreuves sur papier à partir de plaques de cuivre gravées chimiquement.
Utilisation d’un support pierre : Nicéphore constate que plus le support utilisé est "blanc" plus l'effet obtenu est réussi. Il va donc abandonner la pierre (d'autant qu'il n'arrive pas à la graver correctement) pour se tourner vers des supports plus adaptés.
Utilisation d’un support verre : réalisation de points de vue sur verre.
Utilisation d’un support cuivre : Nicéphore concentre ses efforts sur la réalisation et la gravure d'images sur cuivre. Il obtient plusieurs résultats encourageants (cf. le cheval et son conducteur ; la jeune fille filant). Satisfait de ses progrès, il écrit à François Augustin Lemaître, un graveur parisien, afin d'obtenir son avis sur ses réalisations et ses conseils en matière de gravure sur cuivre.
Dispositif optique : Nicéphore entre en contact avec l'opticien parisien Vincent Chevalier afin de perfectionner ses dispositifs optiques. Il équipe sa chambre noire et essaye de se procurer des objectifs adaptés au but qu'il poursuit.
1826
Constat : Nicéphore baptise son invention "héliographie". Il utilise désormais l'étain qui lui fournit de très bons résultats.
Objectif : améliorer la netteté des résultats et la maîtrise de la gravure à l'acide pour les points de vue.
Utilisation d’un support étain : Niépce délaisse le cuivre pour l'étain avec lequel obtient de très bons résultats. Il réussit à graver correctement deux points de vue et réalise plusieurs copies de gravures satisfaisantes (cf. Cardinal d'Amboise, Sainte-Famille, Étienne Pasquier, Prisonnier, etc.). Il obtient des épreuves bien meilleures qu'auparavant et en fait même tirer certaines à un imprimeur local (cf. Cardinal d'Amboise).
Dispositif optique : Nicéphore achète à Chevalier une "chambre obscure perfectionnée" dont l'opticien lui explique le fonctionnement avec soin. Mais ce nouvel instrument ne satisfait pas Niépce qui le renvoie bientôt et passe commande d'objectifs susceptibles d'améliorer l'optique de son dispositif.
Association avec Daguerre : première lettre de Louis-Jacques-Mandé Daguerre, peintre et spécialiste d'optique, qui deviendra l'associé de Niépce en 1829.
1827
Constat : Nicéphore renonce à graver ses points de vue. Rédaction d'une première "Notice sur l'héliographie" à l'occasion du voyage en Angleterre.
Objectif : améliorer ses points de vue en améliorant l'optique de sa chambre noire.
Utilisation d’un support étain : Nicéphore fait parvenir cinq copies de gravures sur étain au graveur Lemaître (cf. Sainte-Famille, Cardinal d'Amboise, etc.). Celui-ci lui renvoie les épreuves obtenues à partir de ces plaques en commentant leurs imperfections. Niépce réalise également des points de vue qu'il renonce à graver devant l'impossibilité de rendre leurs demi-teintes (cf. Point de vue du Gras).
Utilisation d’un support argent : dans sa "Notice sur l'héliographie", Nicéphore évoque la possibilité de substituer des plaques d'argent poli aux plaques d'étain.
Dispositif optique : Niépce commande à l'opticien Chevalier quatre nouveaux objectifs pour sa chambre noire. D'autre part, il interroge Daguerre sur la "Chambre obscure perfectionnée" que ce dernier utilise.
Association avec Daguerre : un an après son premier courrier, Daguerre reprend contact avec Niépce. Il réalise lui aussi des recherches sur la lumière et aimerait connaître le procédé du chalonnais. En août, avant son départ pour l'Angleterre, Niépce rencontre Daguerre à Paris et les deux hommes s'exposent leurs procédés respectifs.
1828
Constat : utilisation d'un nouveau matériau en guise de support de l'image : le plaqué d'argent.
Objectif : améliorer ses points de vue et réduire le temps de pose en améliorant l'optique de sa chambre noire.
Utilisation d’un support verre : durant quelques mois, Niépce expérimente à nouveau le support verre pour développer une application nouvelle de ses procédés.
Utilisation d’un support cuivre : Niépce envisage d'expérimenter à nouveau le cuivre.
Utilisation d’un support argent : sur les conseils de Lemaître, Nicéphore décide d'adopter le plaqué d'argent en remplacement de l'étain. Il réalise des points de vue auxquels il espère donner "toute la dégradation des teintes du noir au blanc".
Dispositif optique : Nicéphore achète à Chevalier de nouveaux objectifs pour sa chambre noire. Mais ceux-ci ne lui donnent pas satisfaction et il décide donc d'en commander d'autres, basant son choix sur les conseils fournis par l'opticien.
Association avec Daguerre : De retour d'Angleterre, Nicéphore rencontre une nouvelle fois Daguerre qui lui fait part de son admiration pour son invention. Au mois de juillet, Niépce écrit à Daguerre qui ne lui répondra qu'un an plus tard.
1829
Constat : rédaction d'une nouvelle version de la "Notice sur l'héliographie" dans laquelle Niépce révèle les secrets de son procédé.
Objectif : réduction du temps de pose.
Utilisation d’un support verre : Nicéphore commande à Vincent Chevalier une douzaine de verres à gravures pour poursuivre une série d'essais commencés l'été précédent.
Utilisation d’un support argent : Nicéphore adopte l'iode pour rendre ses points de vue positifs. Mais malgré de bons résultats, le temps de pose (3 à 4h au soleil) reste encore bien trop long pour obtenir une image correcte. Nicéphore, conscient de l'aide que peuvent lui apporter ses correspondants, envisage de s'associer avec Daguerre et Lemaître.
Dispositif optique : pour réduire le temps de pose, Niépce aimerait disposer d'une chambre noire perfectionnée et espère l'aide de Daguerre sur ce point. Celui-ci remplacera désormais Chevalier pour les questions d'optique.
Association avec Daguerre : reprise de contact avec Daguerre. Très enthousiaste à l'idée d'une association, celui-ci propose ses compétences en optique pour améliorer la chambre noire. Peu intéressé par la question de la gravure, il évince Lemaître et pose ses conditions. En décembre, il se rend en Bourgogne afin de signer les bases d'un traité d'association Niépce-Daguerre.
1830
Constat : progrès dans la réduction du temps de pose.
Objectif : réduire de manière significative le temps de pose en améliorant l'optique de la chambre noire et en augmentant la sensibilité de la substance sensible.
Utilisation d’un support argent : le plaqué d'argent reste le support privilégié des essais des deux associés mais Daguerre ne croit pas en l'inversion à l'iode. Nicéphore expérimente quant à lui différentes substances afin de réduire le temps de pose.
Dispositif optique : Daguerre suggère l'utilisation d'un objectif amélioré et d'un diaphragme afin de réduire le temps de pose. En juin, il livre à Niépce une chambre noire spécialement adaptée à l'héliographie.
Association avec Daguerre : Daguerre se lance dans des recherches optiques et chimiques destinées à améliorer l'héliographie. Il multiplie notamment les essais destinés à tester la sensibilité des substances utilisées par Niépce. En juin, Daguerre passe quinze jours en Bourgogne et les deux associés réalisent ensemble de nombreuses expériences.
1831
Constat : vif intérêt de Daguerre pour les propriétés de l'iode. Niépce est plus sceptique à l'égard des avantages de cette substance.
Objectif : réduire de manière significative le temps de pose en améliorant l'optique de la chambre noire et en augmentant la sensibilité de la substance sensible.
Utilisation d’un support étain : durant l'été, à la demande de Daguerre, Niépce expérimente l'action de l'iode sur l'étain sans obtenir de résultat concluant.
Utilisation d’un support argent : au printemps, Daguerre emploie l'iode sur le plaqué d'argent et obtient des images en un temps record (de 1 à 3 minutes). Mais celles-ci présentent deux défauts : elles sont négatives et non fixées. Nicéphore teste lui aussi cette substance mais il avait déjà constaté ses inconvénients par le passé et n'obtient pas de meilleur résultat cette fois-ci, malgré des essais répétés.
Dispositif optique : Nicéphore aimerait obtenir plus d'aide en matière d'optique. Il compte donc sur son fils pour l'aider sur ce point, Daguerre se concentrant plutôt sur la chimie du procédé.
Association avec Daguerre : Daguerre cherche à trouver une substance sensible pouvant remplacer le bitume de Judée. Très enthousiaste au sujet de l'iode, il réalise plus de 300 essais en quelques semaines. Malgré le scepticisme de Niépce à ce sujet, le peintre ne renoncera pas à cette substance qui entrera dans la composition du daguerréotype (mis au point après la mort de Niépce).
1832
Constat : mise au point d'un nouveau procédé : le Physautotype.
Objectif : réduire encore le temps de pose (bien que les résultats obtenus soient déjà très satisfaisants).
Utilisation d’un support étain : Nicéphore renouvelle ses essais à l'iode sur plaque d'étain. Toujours pas de meilleur résultat (obtentions d'images négatives et non fixées).
Utilisation d’un support argent : les deux associés comparent les avantages et les inconvénients de l'iode et du bitume de Judée sur argent plaqué avant de mettre au point un nouveau procédé : le Physautotype. Si l'image est toujours sur argent plaqué, elle n'est plus obtenue à l'aide de bitume de Judée mais à l'aide de résidu d'essence de lavande dissous dans de l'alcool. Dans les mois qui suivent, les deux associés multiplient les essais à l'aide de cette substance.
Dispositif optique : Daguerre envoie divers instruments d'optique à Niépce. Les progrès réalisés au cours de l'année poussent Daguerre à améliorer la chambre noire (il la dote notamment d'un objectif perfectionné que l'on retrouvera en 1839 sur les premières chambres à daguerréotype).
Association avec Daguerre : si Daguerre vante la précision et la rapidité d'obtention de ses essais à l'iode, il admet que le bitume de Judée reste la meilleure substance sensible. Au mois de juin, mise au point du Physautotype au cours d'un séjour de Daguerre en Bourgogne. De retour à Paris, le peintre concentre ses efforts sur ce nouveau procédé évoquant même la réalisation de points de vue depuis sa fenêtre.
1833
Constat : au mois de juillet, le décès brutal de Nicéphore Niépce interrompt les recherches.
Objectif : améliorer le Physautotype afin de pouvoir faire connaître et vendre l'invention.
Utilisation d’un support verre : Daguerre réalise des Physautotypes sur verre, en raison de l'oxydation rapide de ceux obtenus sur argent. Nicéphore réalise également des essais de ce type.
Utilisation d’un support argent : réalisation de nouveaux Physautotypes. Malgré leurs avantages, ceux-ci s'oxydent rapidement et il est difficile de remédier à cet inconvénient.
Dispositif optique : Nicéphore espère l'aide de son fils Isidore pour divers instruments d'optique. Daguerre fournit également des conseils à son associé mais se consacre plutôt à la chimie du procédé.
Association avec Daguerre : très occupé par ses activités de peintre, Daguerre repousse sa venue en Bourgogne.